Sophie Labbé

Parfumeur de Rose Magnetic

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Essential Parfums

Quel parfum auriez-vous aimé créer ?

Mitsouko de Guerlain. Ce fut mon premier choc olfactif… Ce chypre iconique diffuse beaucoup de profondeur, d’intensité, et la note pêche apporte quelque chose d’envoûtant.

 

Quel parfum portez-vous le plus lorsque vous ne travaillez pas ?

Je porte régulièrement Patchouli Tentation de Bvlgari. C’est une de mes rares créations que je porte souvent ! Mitsouko de Guerlain est aussi un de mes parfums de prédilection.

Qui ou qu’est-ce qui vous a le plus influencé pour devenir parfumeur ?

Tout a commencé à la lecture d’un article dans le magazine Jacinte qui mettait en lumière le métier de parfumeur et mentionnait une école, l’Isipca. Ma famille n’est pas du tout issue du milieu de la parfumerie et quand j’ai découvert que ce métier existait, j’ai souhaité m’inscrire à l’ISIPCA et rencontrer des parfumeurs. C’était en 1985. J’ai simplement appelé chez Jean Patou, une des plus grandes maisons de couture et de parfum de l’époque, et Monsieur Jean Kerléo, le parfumeur de la maison, a accepté de me rencontrer. Ce fut une rencontre décisive. J’ai découvert son univers, les matières premières qu’il m’a fait sentir, qu’il m’a partagé et toutes les facettes de son métier. Je me suis dit que c’était exactement ce que je voulais faire. Quelque temps après, je me suis présentée aux concours de l’école de parfumerie de Versailles, l’ISIPCA, et j’ai retrouvé Jean Kerléo qui était alors président du jury d’admission !

Comment travaillez vous sur un nouveau parfum ?

Il y a d’abord la rencontre avec un designer, un directeur de marque ou une équipe de marketing, ces personnes vont nous donner l’inspiration à travers un brief. Ensuite, il y a l’idée créative qui va interpréter en parfum cette nouvelle histoire et il y a la réalisation de cette idée donc la concrétisation. Les échanges avec les équipes sont décisifs, ils permettent de comprendre les valeurs d’une maison et son envie. Mon rôle de parfumeur c’est de savoir-être à l’écoute de l’autre pour créer ce qu’il imagine tout en sachant élargir le sujet. Il faut oser sortir du cadre pour proposer une idée novatrice. J’aime collaborer et aussi surprendre. Je m’attache à ne pas être là où l’on m’attend pour pouvoir proposer une idée olfactive forte et différente. 

Pourquoi aimez-vous tant créer des parfums floraux et romantiques ?

Au-delà des parfums floraux, ce qui m’inspire c’est créer des parfums qui reflètent la nature dans toute sa beauté. D’ailleurs, j’adore jardiner et les jardins m’inspirent énormément. Je reconnais beaucoup le travail des parfumeurs dans celui du jardinier, dans la patience et la passion que cela demande, pour passer de la graine à la fleur. J’aime aussi la poésie que les fleurs inspirent. Par exemple quand Colette décrivait le gardénia dans son herbier, elle disait sentir à la fois la note verte comme un mousseron (c’est un petit champignon) et en même temps son côté très crémeux, lactée, croquant et cette possibilité de devenir un parfum très envoûtant, très riche comme une tubéreuse. Et en effet elle avait cerné la possibilité d’un gardénia, d’être très frais ou au contraire très charnel. Les fleurs portent en elles tellement de possibilités et de sensations que je ne m’en lasse pas. La création de Rose Magnetic pour Essential Parfums m’a passionné car cela un beau challenge de travailler autour de la reine des fleurs, si complexe et multiple.

En dehors du parfum, quelles sont vos autres grandes passions ?

J’aime voyager, jardiner et lire. Je lis beaucoup plus qu’il y a quelques années. Mon auteure préférée est Aki Shimazaki, c’est une auteure d’origine japonaise, qui vit maintenant au Canada et écrit en français. Ses histoires sont très courtes mais très puissantes émotionnellement, avec des points de vue multiples, qui parlent de la vie, de l’amour. J’aime les titres qu’elle choisit pour ses livres, ils sont toujours liés à la nature, à des fleurs ou des plantes et c’est quelque chose qui me touche. J’aimerais bien savoir écrire, ça m’a toujours fasciné de trouver le mot juste, la phrase qui va générer l’émotion. 

 

Au cours de votre carrière, vous avez eu l’opportunité de changer plusieurs fois de maison de composition. Avez-vous eu besoin de vous réadapter à leurs palettes d’ingrédients ?

Le changement de palette est, à vrai dire, quelque chose qui m’apporte un regain d’inspiration. Lorsque je découvre un nouvel ingrédient, qu’il soit naturel ou de synthèse, cela m’ouvre de nouvelles possibilités, c’est comme un cadeau de Noël ! C’est quelque chose que j’ai beaucoup aimé en arrivant chez Firmenich, découvrir tous ces nouveaux ingrédients issus de la recherche, les molécules exclusives, les naturels, et aussi des outils novateurs, comme l’application EcoScent Compass. Cet outil digital nous permet de tracer nos ingrédients et leur impact environnemental et humain. C’est s’ouvrir à de nouvelles possibilités en matière d’olfaction et d’éco-responsabilité. Et bien sûr, découvrir une nouvelle équipe, collaborer avec de nouveaux parfumeurs est également très stimulant.

Si vous deviez partir sur une ile déserte avec un seul parfum, lequel choisiriez-vous ?

S’il ne fallait en choisir qu’un, cela serait Emporio Armani. C’est le parfum de mon mari, je l’ai créé en 1996 et il lui est resté fidèle.

 

Quel prochain accord pour Essential Parfums aimeriez-vous créer ?

Un iris, une fleur noble aux accents boisés.

03/08/2023

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